Par Aurélien Melior le samedi 31 août 2013, 14:15 - Photographie
Léonard de Vinci conseillait aux peintres en manque d'inspiration devant les paysages, de regarder les fissures des murs.
Je mets mon visage contre les murs, la joue, pour changer de point de vue, pour varier l'angle. Je mets ma tête à l'envers pour en avoir une vision plus approfondie. M'inclinant en avant, le mur est un précipice et j'ai le vertige. En arrière, c'est une montagne à escalader. Ce n'est pas la même chose d'être devant le mur d'un building ou le mur d'une cabane. Le premier, sans fin jusqu'au ciel, me donne le tournis ! Le second est peut-être plus fragile, il me donne envie de m'y blottir. C'est l'angle qui créait l'oppression, la fragilité, l'étourdissement.
Le mur n’est pas le même selon qu’il est vu de loin ou de près. De loin je le perçois dans sa forme ordinaire, fonctionnelle : il me bloque le passage. De près, je l’interprète comme un paysage, qui m’ouvre, au contraire, un espace.
Face au mur, je regarde de tous les côtés, le mur est toujours là ! La seule issue est le ciel qui est en haut. La terre n’est que murs, prisons, et le ciel inatteignable, mystique. La seule façon d’échapper au mur serait-elle d’élever notre pensée jusqu’au ciel ? Richard II, dans la pièce de Shakespeare, est enfermé dans la prison d’un château. Sa cellule est minuscule et les murs gigantesques, il ne peut s’en délivrer qu’en faisant un profond travail sur lui-même. Par la force de son esprit il crée tout un monde. Le mur, au lieu de l’accabler, devient matière à de grandes pensées sur Dieu, le monde, l’homme. Le roi parvient ainsi à s’ « ouvrir un passage à travers les flancs pierreux de ce monde si dur ». Mes observations ne peuvent pas rester de surface. Un premier coup d’oeil n’est pas satisfaisant. Il me faut rester longtemps devant le mur pour en dégager une forme nouvelle, me créer un univers.
Cette série photographique a été exposée en été 2013 à la galerie d'art La Prédelle à Mersuay, en Franche Comté, en compagnie du peintre Benoît Delescluse, le photographe Nicolas Trusch et le sculpteur Joseph Ginet.
(Maj : Avril 2015) La découverte d'un nouveau paysage :